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DOM JUAN – Annulation

Pour Antoine Vitez une table, deux chaises, des flambeaux et une compagnie d’acteurs suffisent pour jouer tout Molière.

Dom Juan n’échappe pas à la règle et la discontinuité affirmée des lieux de l’action sort renforcée de l’absence de décor en permettant de se recentrer sur les personnages en faisant fi du autour. Il y a dans la compagnie, la nécessité du groupe d’acteurs à pouvoir jouer les multiples rôles « les acteurs copient les personnages d’une pièce sur l’autre et celui qui joue un valet ici en garde un peu quelque chose pour jouer un seigneur là-bas. Ou l’inverse. » (1)

Dans notre version, une chaise d’époque Louis XIII dans l’espace suffit, comme chez Antoine Vitez. Elle symbolise les lieux de l’action, le centre de l’intrigue.

La compagnie d’acteurs se fond en une seule personne qui garde une part de chaque personnage quand elle devient autre.

Cela résume notre démarche : dire Dom Juan et le faire entendre dans la plus grande simplicité, sans artifice. Faire rêver par les gestes au service du texte. Une actrice unique qui sur le plateau tour à tour est valet ou seigneur, Guzman ou Elvire.

Elle est mue par les forces contraires de la distanciation et du sentiment, du faire et du raconter, du parler soutenu et de l’ivresse joyeuse de l’allitération, suspendue aux axes (corps, visage, regards) dans un rythme incessant.

Travail de l’altérité, Dom Juan et Sganarelle : « Ce n’est pas à vous que je parle, c’est à l’autre ! ». Ou la séduction dite par un homme racontée par une femme.

Ce minimalisme affirmé s’adapte à tous les lieux, même si le vaisseau théâtre est le plus propice à sa diffusion.

(1) Antoine Vitez-programme des Molière

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Extraits de l’entretien de Nathalie Jungerman (Florilettres) avec Sophie Paul Mortimer sur Dom Juan :

N.J. Comment avez-vous travaillé pour ce jeu en solo ?

S.P.M. On a choisi de penser que c’était Elvire – elle repart au couvent, folle de douleur- qui se repassait tous ces rôles.

Elvire ou l’actrice qui joue Elvire. Finalement, le point de départ, c’est une conteuse, c’est quelqu’un qui vient dire Dom Juan.

N.J. Quelles difficultés particulières avez-vous rencontrées ?

S.P.M. Ce qui m’a été facile, c’est le rôle de Sganarelle que j’ai tenté de trouver dans le déhanché des Burlesques. Pendant des mois, on a travaillé en binôme…alternativement. Le rôle le plus difficile a été Dom Juan. Pour Elvire, évidemment, c’était un peu plus simple.

En savoir plus

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La presse en parle

« Nous aurons été quelques-uns à assister à un Dom Juan très inattendu au théâtre de Vanves, où l’actrice Sophie Paul Mortimer, seule en scène, assume tous les rôles de la pièce. Une performance troublante au service du texte, mise en scène par Jean-Louis Grinfeld »
« Il aura suffi d’une chaise Louis XIII et d’une actrice pour jouer tout Dom Juan »
Danielle Birck (RFI)

« Ce que propose Sophie Paul Mortimer, se jetant solitaire dans la cage aux lions d’un chef d’œuvre du grand répertoire est une illustration plénière de la phrase derridienne « seul l’impossible peut arriver » car la volonté téméraire de jouer à elle toute seule le Dom Juan de Molière, dilatant sa personne ludique pour embrasser la totalité de l’œuvre sans partenaire de jeux, fait advenir ludiquement et mentalement cela que d’aucuns jugeraient impossible »
« La textualité en chair et en os qu’un lecteur halluciné ferait résonner dans son oreille interne et visionner sous ses paupières grand ’ouvertes, en se la jouant par devers lui dans un coin de café ou de bibliothèque. Dans des mouvements rares de transcendance onirique … Oui, j’ai vu/entendu cela à Washington lorsque Sophie Paul Mortimer a déployé cette magie éclatée sur la scène de l’ambassade de France devant un public fasciné »
Roger-Daniel Bensky, dramaturge, Georgetown University, Washington DC

CELESTINA LA TRAGICLOWNMEDIA

Une proposition scénique de théâtre, de cirque et de clown lie le destin des personnages Calisto et Melibea.
L’inégalité de classes de la société troublée du XVème siècle est ici incarné dans la fausse loyauté des serviteurs et d’une entremetteuse Celestina qui utilise l’infortune et la souffrance de ses maîtres pour s’enrichir.
Avec un jeu d’acrobaties, de jonglage et d’expression corporelle, La Escalera de Tijera tisse dans un rythme de comédie le grand classique de la littérature espagnole de Fernando de Rojas.
Un spectacle TragicomiCLOWN qui révèle les émotions hautes et basses des êtres humains à travers des personnages de cirque.

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Una visión clara y sincera, con un gran respeto al célebre clásico, pero a la vez con la necesidad de búsqueda de nuevos retos y distintas formas de mirar a los personajes de la obra.
A través de la improvisación y con un desarrollo creativo salpimentado con elementos que ya nos caracterizan como son el trabajo del cuerpo, el circo o el clown, hemos conseguido crear un espectáculo “tragiclównmico”, donde se visualizan las miserias, vilezas y ruindades del ser humano, conductas que históricamente delatan al hombre en su avaricia y ansia de poder. Una historia contada de forma directa, sencilla y cómica, utilizando una escenografía con puertas que giran con el fín de conseguir posición, dinero y poder.


Tres actores mudan su atrezo y vestuario a velocidad pasmosa para interpretar multitud de personajes, ejecutan rutinas de malabares y acrobacias dramatúrgicamente introducidas para explicar las situaciones, y de forma imaginativa manipulan objetos que cambian los sentidos argumentales. Nuestra visión de La Celestina tiene poco texto, bastante teatro gestual, danza y por supuesto circo: malabares, portés, acrobacias y humor… mucho humor.
La propuesta además pretende ser referencia para “nuevos públicos”, un acercamiento al clásico mediante un lenguaje sencillo y divertido. Abre la puerta al atractivo del disfrute teatral a la vez que fortalece el interés por la lectura.

Obra recomendada para mayores de 13 años.

ARTISTES EN EXIL

Les rêves sont mystérieux, mystérieux, fabuleux et fantasmagoriques.  Ensemble nous nous retrouverons entre rêve et réalité, nous lirons et démontrerons, nous plongerons dans le monde des désirs et de leur réalisation.
Suivons le rêve et touchons-le.
La règle principale pour les spectateurs est « Ne prenez pas tout au sérieux! ».

Trois spectacles proposés : 

14h30 – L’attrapeur de rêves »
Genre comedie physique clown

16h30 – Il, Elle, et Kolya et Olya
Une histoire-tragifarce touchante sur la recherche de l’amour, sur la valeur qu’on lui donne et ce qu’il faut en retour.

19h – Moscou-sur-Vodka
Un voyage alcoolisé à travers la spirale du héros lyrique Venichka; sur le pouvoir, l’effondrement des espoirs et – bien sûr – sur l’amour.

Ces spectacles ont été au performance-au programme OFFdu festival d’Avignon 2022

JOURNAL DE L’ANNÉE DE LA PESTE

C’est Jean-Claude Carrière qui avait attiré mon attention sur cette œuvre de Daniel Defoe en novembre 2020 lors de la pandémie. Pour créer ce spectacle, nous avons choisi de conserver la forme du journal intime qui permet de rendre compte de l’âme du personnage, un être humain comme vous et moi qui vit de l’intérieur la peste et ses ravages.
Confronter ainsi directement le public à un personnage très éloigné au premier abord d’un homme du XXIème siècle – Mark Saddler, un commerçant anglais et puritain du XVIIème siècle – c’est permettre par cette distance de saisir avec beaucoup de perspicacité l’universalité des interrogations de l’être humain lorsqu’il se retrouve confronté à la maladie et à la Mort.
Mark Saddler, en partageant son expérience quasi-sensorielle de l’angoisse, de la douleur, de la maladie, du deuil mais aussi de l’attente et de l’espérance nous permet de poser un regard distancié sur l’un des épisodes épidémiques les plus angoissants de l’âge moderne – La Grande Peste de Londres de 1665 – afin de mieux saisir et déchiffrer les effets et conséquences de la pandémie actuelle.
Car ce journal éclaire avec une surprenante acuité, la crise que nous traversons, nous plongeant dans les méandres l’âme humaine. Tout comme pour les londoniens du XVIIème siècle, chaque catastrophe casse le cycle perpétuel du superflu : chacun est confronté à lui-même. Pour les survivants, une seule interrogation demeure : quel sens donner à sa vie ?

Cyril le Grix

LE BREVET DE SORCIER

Rosario Clercler est un sorcier et il porte malheur à tous ceux qui le côtoient ! Du moins, c’est ce qu’ils disent tous dans le village. Rendu fou par l’exclusion sociale, Clercler exige une licence, une sorte de brevet qui sera pour lui la reconnaissance officielle de son présumé pouvoir de sorcier. Le juge André, convaincu sérieusement que la malchance n’existe pas, veut rendre justice au pauvre homme si injustement banni de sa communauté, mais Clercler est d’un tout autre avis..

POUR LE MOMENT

Ce projet est né suite à la rencontre de 3 comédiennes originaires d’Amérique Latine immigrées volontairement en France : Gabriela Aranguiz (chilienne), Johanna Rua (argentine) et Leticia Casanova (uruguayenne). Cette richesse multiple nous a encouragé à nous réunir pour questionner un thème qui nous ait cher : les exils à l’époque de la dictature militaire dans les années 70’s et 80’s en Amérique latine. « Je suis née réfugiée politique. Je suis née avec un accent circonflexe sur ma tête. Je m’appelle Alice. Alice pour le moment. Parce qu’il fallait bien décider d’un prénom à notre arrivée ici. »

ANTIGONE – travail d’atelier amateur

« Je ne veux pas comprendre. C’est bon pour vous. Moi je suis là pour autre chose que pour comprendre. Je suis là pour vous dire non et pour mourir. »

Antigone, figure de la révolte et de la résistance, se dresse seule contre le pouvoir royal, et meurt pour avoir voulu donner une sépulture à son frère Polynice.
Personnage clé de la tragédie antique, elle apparaît chez Eschyle, Sophocle, Euripide, puis se retrouve au fil des siècles sous la plume de Rotrou, Racine, Cocteau, Brecht, Yourcenar… et bien sûr Anouilh, qui lui donne une résonance particulière dans le contexte de la seconde Guerre mondiale :
« L’Antigone de Sophocle, lue et relue et que je connaissais par cœur depuis toujours, a été un choc soudain pour moi pendant la guerre, le jour des petites affiches rouges. Je l’ai réécrite à ma façon, avec la résonance de la tragédie que nous étions alors en train de vivre».

La mise en scène de Véronique Gargiulo, sobre et épurée, tend à créer cet « espace vide » cher à Peter Brook pour mieux faire entendre le texte, dans sa force directe et sa puissance poétique.

CASSÉ

Une ouvrière licenciée de Prodex, comprenant le licenciement inévitable de son mari de chez Sodecom, trouve dans son désespoir l’énergie folle d’organiser une rocambolesque supercherie…
Quiproquos, rebondissements, personnages hauts en couleur, Cassé est un vaudeville noir hilarant et impitoyable.

« Rémi De Vos est un des auteurs, si ce n’est l’auteur, qui a le plus travaillé la question du travail. Nous avons d’ailleurs assisté lors du festival d’Avignon 2019 à une rencontre sur cette thématique à l’occasion de laquelle plusieurs de ses pièces ont été lues. Nous réfléchissions alors déjà à un travail autour de l’œuvre de Rémi De Vos dans le traitement de sa thématique du travail. »
Anne-Sophie Pathé – codirectrice artistique de la compagnie

L’idée de créer un dyptique sur le travail autour des pièces Débrayage et Cassé de Rémi de Vos est née.

Débrayage est créé lors du festival Off d’Avignon 2022.
https://www.libredesprit.net/creations/debrayage/

« Ces problématiques me plongent dans mon passé personnel. La question du flux des réfugiés fait écho à mes origines, étant moi-même kosovar arrivé en France en 1991 alors que je ne parlais pas un mot de français… Mon emploi chez Citroën, où j’ai alors travaillé à la chaîne de jour comme de nuit, me rendent familières les usines qui ont déserté le Pas-de-Calais dans les années 90, laissant la population comme orpheline. Ma sensibilité propre à la question du travail et sa résonance permanente lorsque nous sommes en résidence à Gravelines ou Noeux-les-Mines au plus près des populations associées à la rencontre avec Rémi De Vos, qui a bien connu lui aussi la perversité des entreprises en enchaînant les petits boulots, et son œuvre autour de cette question m’ont conduit tout naturellement à un diptyque sur le travail autour des pièces Débrayage et Cassé. Ces deux pièces, dont le format diffère, sont complémentaires et permettent d’aborder en profondeur la complexité de cette problématique fondamentale. Dans les deux, on rencontre une galerie de personnages témoignant de l’universalité de la question. Les ravages du travail touchent tout le monde, avec des problématiques propres : jeunes, vieux, riches, pauvres… chômeurs mais aussi travailleurs… L’humour décapant de Rémi De Vos et son sens aiguisé de l’absurde permettent de prendre de la distance et de détacher de ses idées reçues pour ouvrir de nouvelles pistes de réflexion… »
Nikson Pitaqaj – metteur en scène des pièces Débrayage et Cassé

Cassé ouvre le débat sur les thématiques du travail, plutôt les ravages de la perte du travail. Si le travail peut être source d’épanouissement, il peut pareillement détruire individus et sociétés.
Suite aux déclarations récentes de la ministre déléguée à l’industrie, Agnès Pannier-Runacher qui associe l’industrie à la magie, les voix des ouvriers s’élèvent pour dénoncer les cadences infernales, la surveillance suspicieuse et infantilisante, les conséquences lourdes sur la santé physique et psychique et leur espérance de vie inférieure de six à sept ans à celle des cadres…
Cassé, son humour impitoyable, l’absurde des situations et la légèreté du jeu des comédiens, permet de prendre de la hauteur face à une réalité qui nous fait perdre nos repères jusqu’à notre dignité et alerte notre vigilance mieux que de longs discours.
Après de nombreux mois où la Culture, taxée de « non essentielle », a été mise à l’arrêt, il est urgent qu’elle reprenne sa place au cœur de la Cité pour s’emparer des préoccupations partagées ici et maintenant. Loin d’une image de la Culture inaccessible qui témoignerait du fossé creusé entre une élite et le quotidien de millions de travailleuses et travailleurs en France, la compagnie Libre d’Esprit, avec Cassé, fait le choix d’un théâtre populaire et exigeant qui interpelle tout en profondeur, humour et finesse sans tomber dans un manichéisme simpliste.

LE JEUNE AMOUR

Deux Contes humoristiques, dramatiques et savoureux de Jean de La Fontaine sont mis en sens et en musique par deux artistes du premier mouvement baroque : Christine Bayle, actrice, et Marianne Muller, violiste, aiment la fantaisie des histoires d’amour de « La Matrone d’Ephèse » et de « la Courtisane amoureuse » où le suspens le dispute à l’humour.

Empruntant à Pétrone et à Boccace, La Fontaine les place sous la bannière du « jeune Amour », peut-être pour excuser les faiblesses humaines. Il y exerce son talent ironique à côté des musiques choisies en Europe, de Ste Colombe, Dubuisson, Marais, à Hume et Abel.

« Diversité c’est ma devise. » La Fontaine

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Christine Bayle est danseuse, chorégraphe – elle a créé et dirigé L’Eclat des Muses et Cie Belles Dances et réalisé plus de cinquante productions –  on sait moins qu’elle est aussi actrice (Jeune Théâtre), passionnée par la belle danse, le théâtre, la musique, la recherche sur les différents styles de danse du XVIe au XVIIIe siècle autant que sur la pratique de l’opéra, et la transmission conjointe de ces différents arts. Enseignante au DMA du CRR de Strasbourg (1987-2013).

Témoin et actrice du renouveau baroque, Marianne Muller mène dans le monde entier, une carrière de concertiste. Elle crée l’Ensemble Spirale qui se consacre au répertoire soliste de la basse de viole. L’ensemble « Du souffle à L’archet » explore le répertoire des consorts songs. Ses goûts pour le théâtre, la musique contemporaine et la danse enrichissent encore son jeu. Professeur au CNSMD de Lyon (1988-2021). Sa discographie compte plus d’une cinquantaine de titres.‌

CARNET DE VOYAGE Diarios de motocicleta : Notas de viaje por América Latina

Le 29 décembre 1951, deux jeunes argentins entreprennent un voyage à travers l’Amerique latine sur une vieille Norton 500 « La Poderosa II ». Ernesto Guevara est un jeune étudiant en médecine de 23 ans, spécialisé en léprologie. Alberto est un biochimiste de 29 ans. Sur leur chemin, ils pénètrent les racines d’un passé invisible mais encore habité et rencontrent des êtres simples et bouleversants. La confrontation avec la réalité sociale et politique des pays visités et les rencontres qu’ils vont faire les amènent à prendre conscience de la réalité du monde et la misère dans laquelle vivent les populations. Cette expérience éveillera de nouvelles vocations…

Ce qui m’intéresse et me touche dans ce « Carnet », c’est l’universalité qui émane de cette œuvre. Il s’agit de vivre ce voyage avec cet homme, à cette période de sa vie. « Voyage à Motocyclette » est une expérience, une traversée qui change tout homme. D’une beauté poétique fulgurante, l’écriture est à la fois concrète et d’un réalisme au plus près de l’action et du ressenti émotionnel. Comme le dit l’auteur lui-même, il ne s’agit pas d’un récit mais « de fragments de vies parallèles ou entrecroisées ». Les mots respirent la vie et transpirent cette expérience du terrain, « l’expérience vécue ». L’œuvre se compose d’une narration, de paysages extraordinaires, de sentiments intimes, de rencontres, de bouillonnements d’êtres et de destins et de prise de conscience.

« Voyage à Motocyclette » nous fait pénétrer au cœur du continent Sud-Américain, dans le grand théâtre du monde. Universelle et intemporelle, l’œuvre s’inscrit à la fois dans le présent mais aussi dans le passé, celui des cités perdues, des civilisations oubliées, celui des peuples disparus qui aujourd’hui errent sur les routes, du peuple chassé et humilié : celui des indiens d’Amérique, d’un âge d’or, d’un monde aujourd’hui mort et elle nous renvoie ainsi à notre propre histoire : Comment comprendre le présent si tu ne connais pas ton passé ? Un peuple peut-il continuer d’exister sans ses racines ?

L’œuvre est subjective, nostalgique et mélancolique mais aussi portée vers l’avenir. Elle est une vision des enjeux et des conflits de demain et avec lucidité, l’auteur nous catapulte dans ce que sera l’Amérique du Sud : les grands bouleversements politiques (dictatures, conflits), économiques (injustices, exploitations), sociaux (inégalités, fractures), culturels (pertes d’identité et disparition de certaines communautés autochtones) et écologiques (exploitations des richesses naturelles, déforestations, pollution, extinctions de certaines espèces, sécheresse, etc.).

J’ai voulu porter cette « vie » et « faire ressentir cet élan », « ce bouillonnement d’êtres » sur la scène. Il s’agit de faire vivre au spectateur « l’expérience » de ce voyage, de faire exister ces rencontres et de faire ressentir les éléments physiques et naturels que les personnages vont traverser : donner à ressentir les conséquences des bouleversements, le poids du passé et le vide d’aujourd’hui pour arriver à plonger véritablement au cœur des destinées et de se laisser pénétrer par « l’Esprit » de cette Amérique en pleine mutation. La Nature est ici au cœur du voyage, elle jouera un rôle essentiel et va directement agir sur les personnages.

Il s’agit aussi d’entraîner le spectateur au cœur d’un destin, à l’intérieur d’une âme pour donner au spectateur l’expérience que vivra l’auteur : Celle de l’universalisme et de l’humanisme et cet invisible mouvement qui va faire d’un « homme ordinaire », un « combattant révolutionnaire ».

A fleur de peau, toujours à la limite, extrême, sur le fil sensible de la vie ce « Carnet » est au cœur d’une actualité sensible et explosive. Ce texte ouvre sur toutes les déchirures actuelles : Frontières, immigration, capitalisme, mondialisation, exploitation des richesses naturelles, misère, choc des cultures et des civilisations tout en nous donnant le recul essentiel, le froid sublime de ne pas être sous le flux de l’information et de la communication stérile d’un système.

Mais surtout ce « Carnet de Voyage » est un message d’amour, un cri de liberté, un appel à l’humanité, à l’idéalisme, au rêve de fraternité, cet idéal de jeunesse éternel, d’inconscience, de naïveté, de sagesse, d’un homme nouveau, d’un monde meilleur. Une quête pour un message d‘union, mais aussi de singularité, un voyage dans le présent mais aussi dans le temps à la rencontre de l’histoire, des racines de chaque peuple, loin de la mondialisation et du capitalisme, loin de la société de consommation. C’est la vision utopique d’un monde de partage véritable.

Il était essentiel de ne pas anticiper les événements et de préserver la naïveté et l’inconscience de ce Carnet pour nous amener a percevoir l’évolution d’une âme, d’un être, à travers les événements qu’il traversera jusqu’à cette invisible prise de conscience au fur et à mesure des rencontres, sur le fil, et qui va faire naître un homme nouveau… Le tournant dans le destin d’une vie.