Une autrice a-t-elle écrit l’œuvre de Shakespeare ? Telle est la question… et l’enjeu de cette passionnante et intrigante enquête menée, avec rigueur et humour, par Aurore Evain, d’après l’essai de la chercheuse américaine Robin P. Williams.
Femme ou homme, peu importe ? Cela ne changera pas la puissance de l’œuvre, mais peut-être celle de l’Histoire de la littérature… car c’est bien l’androcentrisme de cette Histoire qui sera ici remis en question. Et ses conséquences sur la légitimité des femmes à penser, créer, diriger, participer au mouvement du monde.
Exposons pour commencer les deux termes de l’équation :
* Mary Sidney Herbert, comtesse de Pembroke, est l’une des plus brillantes des illustres inconnues qui peuplent l’histoire littéraire.
Elle développa et anima le plus important cercle de littérature de l’histoire anglaise. Elle consacra sa vie à la production de grandes œuvres en langue anglaise : projet ambitieux, car l’anglais n’était pas alors considéré comme une langue de premier plan.
Polyglotte, parlant couramment latin et maîtrisant sans doute le grec, d’une érudition exceptionnelle, pratiquant l’alchimie et la médecine, la musique, la fauconnerie, la politique, l’occultisme…, elle fut aussi la première femme dans son pays à faire éditer une pièce en anglais : traduite du français, sa tragédie Antonius fut une source d’inspiration pour ses contemporains et servit de modèle à l’Antoine et Cléopâtre de Shakespeare. Elle fut la première autrice à ne pas s’excuser de publier ses œuvres.
Il était néanmoins inconcevable, en raison de sa condition sociale et de son sexe, qu’elle signa des pièces destinées aux acteurs du théâtre professionnel.
* William Shakespeare est le plus inconnu des plus célèbres de nos écrivains. Aucun de ses manuscrits ne nous est parvenu. Son testament ne mentionne aucun livre, ni aucune de ses nombreuses œuvres restées inédites à sa mort. En 1616, aucun hommage ne lui est rendu. Les quelques traces que l’on conserve ont trait à son métier d’acteur. Aucun document stipulant qu’il fut payé en tant qu’auteur. Il n’est jamais fait mention de son implication dans les cercles littéraires de l’époque.
Toute sa famille était illettrée. Son père, un temps huissier, signait d’une croix. On ne lui connaît aucune formation, et aucune archive n’indique qu’il s’est formé dans aucune des disciplines sur lesquelles il a écrit (droit, Histoire, médecine, alchimie, fauconnerie…). Ses origines sociales sont très éloignées des connaissances aristocratiques que supposent ses œuvres. Les pièces de Shakespeare se déroulent souvent à l’étranger, et comportent des descriptions remarquablement précises. Aucune trace d’un quelconque voyage de Willie hors de son pays.
Et maintenant résolvons l’équation…
La presse en parle
« Ce spectacle est une mine, il nous tient en haleine de bout en bout et opère une véritable déflagration intellectuelle. »
Marie Planchin – sceneweb.fr
« Mais non, vous dis-je, ce n’est pas une hypothèse infondée, bien au contraire ! Allez donc voir au Théâtre de l’Epée de Bois , à la Cartoucherie de Vincennes, Mary Sidney, alias Shakespeare, d’Aurore Evain. Avec tout le sérieux et l’ironie facétieuse qu’on lui connaît, l’autrice-actrice-metteuse en scène y répond du tac au tac à Fanny Zeller, qui campe non moins plaisamment l’avocate du diable masculiniste. Vous avez jusqu’au 25 septembre. »
Sylvia Duverger – mediapart.fr
