Archives pour la catégorie se joue en Avril 2026

DOUX OISEAU DE JEUNESSE

À San José, dans une chambre d’hôtel, un jeune homme ambitieux et une actrice célèbre mais déchue se retrouvent le temps d’une nuit. Il espère encore percer, elle fuit l’humiliation. Leurs deux solitudes se confrontent, entre illusions qui s’effilochent, marchandages et restes d’espoir.

Tennessee Williams explore ici les fractures d’une Amérique des années 50, marquée par le racisme, le puritanisme, le pouvoir patriarcal. Le monde du cinéma hante la pièce comme un mirage féroce. Sur cette toile de fond brutale, il dessine des figures blessées, vibrantes, traversées par le désir, la honte, la rage de ne pas disparaître.
Cette mise en scène s’attache à faire entendre la langue sensible et directe de Williams, à laisser vivre les corps, les tensions, les flux de paroles et les silences. Elle cherche à ouvrir un espace de jeu où les contradictions des personnages peuvent exister pleinement : entre colère et tendresse, grandeur et chute, rire et blessure. Là où la réalité rencontre la poésie. Et où, malgré tout, une forme de fraternité d’âmes peut surgir.

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Amérique des années 50, au bord du golfe du Mexique. Une chambre d’hôtel, un duo étrange : Chance Wayne, encore très séduisant malgré les années, revient dans sa ville natale, sans succès ni avenir, porté par un seul espoir : retrouver Angéline, son amour de jeunesse. Fille d’un politicien local, John Finley, raciste, ambitieux et brutal, elle est désormais tenue à distance, recluse par un père prêt à tout pour protéger sa réputation. Chance n’est pas seul. À ses côtés : Alexandra De Carlo, alias Princesse, star vieillissante, fuyant l’écran qui trahit ses traits et la gloire déchue. C’est au creux d’une nuit d’effondrement que Chance l’a recueillie, au pied d’un escalier, avant de l’entraîner avec lui vers le Sud, dans sa Cadillac. Lui rêve de célébrité, elle cherche l’oubli. Leur pacte est en apparence simple : il l’aide à s’effacer et à lui rendre la vie plus douce, elle lui donne les moyens de briller. Mais entre alcool, drogue et transactions financières, se noue une relation trouble, mêlant cynisme, désir et solitude. « Quand un monstre en rencontre un autre, il faut bien que l’un dévore l’autre », dira Princesse.

Mais à San José, le retour de Chance déclenche une onde de choc. Le gouverneur Finley prépare un meeting. Il veut y exhiber la jeunesse blanche du Sud, enterrer les scandales : l’opération subie par sa fille — causée, dit-on, par une relation passée avec Chance — et le lynchage d’un jeune homme noir qu’il a lui-même orchestré. Finley exige la présence publique de sa fille. Devant son refus, il menace : si Chance ne quitte pas la ville, il sera mutilé. Le meeting vire à l’émeute. Pendant ce temps, à l’écran, le film d’Alexandra triomphe. Son aura, qu’elle croyait flétrie, redevient iconique. Elle retrouve assurance, vanité, pouvoir. Elle offre à Chance une issue : fuir avec elle. Mais il refuse. Chance reste. Seul, vide, en bout de course. Il a tout perdu : l’amour, la jeunesse, ses illusions. « Notre ennemi à tous, c’est le Temps », dira-t-il en dernier. Et il attend, sans fuir, que la violence du monde s’abatte sur lui.

OPÉRA – STUDIO

L’association Lyricando propose deux œuvres « phare » de l’opéra italien du XIX° siècle.

Toutes deux dressent un portrait de femme que la maladie emporte et dont la condition sociale détruit toute possibilité d’accéder au bonheur et à l’amour.

Des générations d’auditeurs se sont reconnues et se reconnaissent encore dans ces deux figures qui disent les espoirs et les vicissitudes de la vie avec ce que l’art lyrique sait transmettre de plus sublime et de plus bouleversant.

Nous nous proposons de mettre en regard les deux titres afin de confronter deux visions différentes d’une même thématique. La Traviata prise comme illustration parfaite de l’opéra romantique italien et La Bohème comme témoin d’une mutation dans notre vision de l’aventure humaine qui nous projette dans la modernité.

Chaque œuvre sera présentée accompagnée au piano dans une version réduite d’une heure vingt environ.

La Traviata, Giuseppe Verdi, 1853, d’après La Dame aux camélias d’Alexandre Dumas fils

La vie tumultueuse et tragique d’une courtisane dans le Paris du milieu du XIX° siècle. Violetta sacrifie son amour et sa vie pour sauver l’honneur d’Alfredo, le seul homme qu’elle a aimé passionnément.

La Bohème, Giacomo Puccini, 1896, d’après les Scènes de la vie de Bohème de Henry Murger

Un groupe de jeunes artistes dans le Paris du milieu du XIX° siècle. Mimi rencontre Rodolphe et c’est du difficile art d’aimer que va traiter l’opéra. Un art désormais soumis à une série de questionnements qui condamnent le tragique romantique au fait divers.

ÊTRE VIVANT – Paroles des oiseaux de la terre

Au lever du jour, une cabane nomade est arrivée sur le plateau du théâtre et semble s’animer toute seule. Des poules entrent en scène. La clowne Fourmi est juste là pour les accompagner. Elles ont quelque chose d’essentiel à partager avec le public. Fourmi ne sait pas comment cela va se manifester, ni à quel moment. Dans cette attente, Fourmi trouve des espaces de parole pour raconter son histoire et partager avec les poules de surprenants moments de vie et de jeux. Ouvrant un espace sonore drôle, et intriguant, elle dialogue avec elles pour questionner notre monde, tout en questionnant le leur et le regard que nous leur portons. Chaque instant devient précieux. Nous sommes suspendus à ces petits êtres à la présence étonnante sur scène, qui nous touchent, nous surprennent, nous questionnent. Et on ne sait jamais vraiment comment ça va se passer… Fourmi fait le lien entre le monde humain et le monde animal, entre le plateau et le public. Par sa sensibilité, elle témoigne d’un lien d’affection, de leurs chemins respectifs qui se croisent et font écho au monde actuel. Une façon de porter un regard d’égalité, loin des préjugés. Il ne s’agit pas de « dressage », mais de collaboration. Tout est basé sur le plaisir que les poules peuvent éprouver au travers de la relation avec l’humain, et parle jeu. Nous nous adaptons à leurs rythmes et à leurs envies, à leur personnalité. C’est par un lien de confiance mutuelle, et de respect profond tout en privilégiant leur bien-être que nous arrivons à œuvrer ensemble. A partir d’un texte de François Cervantès, et faisant suite à une fructueuse collaboration avec Catherine Germain et Emmanuel Dariès, cette création laisse le « vivant » s’épanouir sur le plateau, avec toutes ses maladresses, ses imperfections, et ses « coups de théâtre », qui convoquent le rire, et l’étonnement de l’enfance.

EMMA PICARD

Le roman
Un faux pas dans la vie d’Emma Picard
 est le troisième roman d’une tétralogie consacrée à l’histoire de familles françaises en Algérie (C’était notre terre, Les Vieux Fous, Un faux pas dans la vie d’Emma Picard, Attaquer la terre et le soleil — pour ce dernier roman, Mathieu Belezi a reçu le prix Le Monde 2022 et le prix du Livre Inter 2023).
Dans les années 1860, pour échapper à la misère en France, Emma Picard, paysanne, veuve et mère de quatre fils, accepte de partir en Algérie cultiver vingt hectares de terre que lui octroie le gouvernement français.
Après quatre années de labeur infructueux, de deuils et de catastrophes naturelles, elle s’assied près de Léon, le plus jeune de ses fils, blessé, et fait le récit — lyrique et poignant — de son combat permanent pour la survie.
Le récit qu’Emma fait de sa vie et de ses épreuves est parsemé de questions par lesquelles elle tente vainement d’impliquer Léon dans un impossible dialogue et qui nous ramènent constamment à la situation douloureuse d’une mère qui veille son enfant souffrant.
Dans ce monologue, livré d’un trait comme en un expir, Emma Picard se raconte et dresse le portrait d’une femme de condition modeste au XIXème siècle.

Qui es-tu Emma Picard ?
Colon par nécessité, Emma Picard est avant tout une paysanne. Son récit témoigne d’un rapport viscéral — sensible et poétique — à la nature, mais aussi au travail de la terre, qu’elle mène avec une détermination sans faille jusqu’à l’entêtement tragique.
Dès le début du récit, puis sous la forme d’un leitmotiv lancinant, Emma Picard se désole de sa propre naïveté, estimant s’être fait berner par les fonctionnaires du gouvernement français. Les phases d’espoir et de découragement successives au fil des épreuves endurées la laissent aussi peu à peu en proie au doute et à la colère face à la religion.

La tragédie universelle des sans-voix
Le texte de Mathieu Belezi s’inscrit dans la grande tradition d’une littérature qui donne une voix à celles et ceux dont on ne parle jamais et qui n’ont jamais la parole. En ce sens, il apporte un éclairage singulier sur l’histoire de la colonisation de l’Algérie. Femme, veuve, pauvre, à la merci des puissants, tentant désespérément de survivre dans des circonstances hostiles, Emma Picard est une héroïne tragique, emblématique de tous les laissés-pour-compte, qui nous interpelle par la dimension universelle d’une tragédie personnelle livrée dans l’intimité d’un soliloque bouleversant.
A son arrivée en Algérie, Emma Picard est conduite sur ses terres par Mékika, un algérien qui choisit de rester avec elle et ses fils pour travailler à la ferme. Loin d’occulter le drame de la colonisation qui est omniprésent dans le récit, la relation qui se tisse entre Emma, ses fils et Mékika nous parle de solidarité dans la lutte pour la survie et de la fraternité des travailleurs de la terre.

Du roman à la scène
Tout en préservant les propriétés stylistiques du long monologue d’Emma Picard — que Mathieu Belezi décrit comme un lamento — nous nous sommes efforcés d’en restituer la bouleversante humanité.
Du fait de la situation d’Emma lorsqu’elle entreprend son récit (anéantie, assise sur une chaise), la mise en espace est nécessairement sobre. C’est donc essentiellement par les nuances et les subtilités de l’interprétation que l’on pourra amener le spectateur au plus près des émotions du personnage et que l’on fera entendre la beauté du texte.

Extraits de presse

L’HumanitéGérald Rossi
Marie Moriette est éblouissante dans ce seule en scène adapté du roman de Mathieu Belezi. Un beau et grand moment de théâtre. (lire la suite)

SNES-FSUFrédérique Moujart
Dans un décor épuré, au bord de la folie, Emma, admirablement incarnée par l’éblouissante et bouleversante Marie Moriette, nous dit avec force et lyrisme cette tragédie. Il faut aller voir ce spectacle en tous points fascinant et d’une grande intensité émotionnelle.

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Froggy’s delightNicolas Arnstam
Marie Moriette, magistrale, tient le public en haleine dès les premières minutes, elle délivre magnifiquement le texte d’une grande force de Mathieu Belezi. Un formidable spectacle dont on sort sonné, porté par une prestation de comédienne impressionnante.

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HotelloLouis Juzot
Marie Moriette s’appuie sur un jeu naturaliste mais qui reste sobre. Le dispositif est simple, lumière et musique sont distillées à bon escient. Le tableau est sensible et s’inscrit dans l’esthétique populaire et revendicatrice de la deuxième moitié du dix-neuvième siècle d’un Courbet ou d’un Zola.

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L’œil d’OlivierMarie-Céline Nivière
La mise en scène d’Emmanuel Hérault, d’une belle sobriété, est centrée sur cette femme terrassée qui veille sur son petit. Marie Moriette fait résonner avec une intensité poignante la belle supplique de cette femme au cœur brisé, au corps usé par le travail, à l’espérance vaincue.

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ACHAC Groupe de recherche sur l’histoire coloniale
La Compagnie Okeanos propose une adaptation poignante du roman de Mathieu Belezi. Au récit rare de cette ultime tentative pour échapper à la misère, s’entremêle celui de la colonisation française et de sa brutalité. Ce seul-en-scène bouleversant est à ne pas manquer.

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I/O LA GAZETTE DES FESTIVALSYsé Sorel
Porté par une interprétation intense de Marie Moriette, le spectacle, fait le choix judicieux de la sobriété. La langue, à la fois lyrique et profondément terrienne, vibre et prend toute la place pour donner à entendre le destin tragique de cette « vie minuscule » qui participe à la grande histoire.

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FILLE DE PANAMEMarina Glorian
Un récit poignant, porté avec force et subtilité par la magnifique comédienne Marie Moriette, intime, fébrile, lyrique, tragique… La très belle adaptation du roman pour la scène nous restitue la parole de cette paysanne qui a cru à une nouvelle vie. Ce spectacle résonne longtemps en nous.

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LICRAJean Louis Rossi
Jamais le sujet des petits colons partis pour exploiter une terre aride en Algérie n’avait été dévoilé de la sorte. La mise en scène minimaliste est servie par Marie Moriette, une comédienne qui nous amène au plus près de l’émotion de cette femme courageuse. Un spectacle d’une grande humanité.

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La ProvenceAngèle Luccioni
Dans un clair-obscur de circonstance, la comédienne Marie Moriette livre un monologue d’une rare intensité dramatique. Cette création d’une vive sensibilité prolonge l’effort de Mathieu Belezi pour faire revivre au public une vérité historique tragique, trop longtemps ignorée ou déformée.