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LETTRE D’UN SINGE AUX ÊTRES DE SON ESPÈCE

Le motif de base de la Résistance était l’indignation… nous appelons les jeunes générations à faire vivre, transmettre, l’héritage de la résistance et ses idéaux. Nous leur disons : prenez le relais, indignez-vous ! écrit Stéphane Hessel.

Ce qui indigne Stéphane Hessel en 2010 – l’existence des sans-papiers, les mauvais traitements réservés à la planète, les écarts de richesse dans le monde – est à rapprocher de la révolte de César, le premier des indignés, en 1781.

Les hommes, pis que des enragés, se servent de leur raison pour imaginer tout ce qui est propre à les rendre malheureux. D’abord, on dirait qu’ils ont établi qu’ils ne seraient pas égaux. Qu’il y aurait dans la même espèce des « Possédant tout » et des « N’ayant Rien ».

En 2019, si nous regardons le monde dans lequel nous vivons avec les yeux de César, il est évident que le saccage de la Nature, la disparition des autres espèces ne vont pas rendre l’Homme plus heureux. Encore une fois, l’Homme ne fait qu’accroitre son propre malheur. On retrouve aujourd’hui cette folle inégalité entre les êtres humains, qui révolte tant César. Cette même injustice entre les Possédant-tout et les N’ayant rien. Impossible de ne pas se dire, comme César : L‘Homme est dingue !
Nous allons prendre le relais. Faire entendre le cri de révolte du Singe et aussi son rire.

Faire entendre La Lettre d’un Singe aux êtres de son espèce de Restif de La Bretonne, un texte de salut public avec, dans le rôle de César-Singe, l’acteur Eddie Chignara.

MOLOCH

MOLOCH Un poème
Une ballade au royaume des Ogres, habitée de l’écho d’épopées barbares et amoureuses, où désir et sidération se côtoient dans un brasier ardent, peuplée de bourreaux, de militaires aux convictions nationalistes, d’ogres affamés d’enfants innocents, d’une jeune fille qui découvre que son père qu’elle aime passionnément est un psychopathe. La guerre, l’amour, nos champs de bataille…  Dans le paysage, les ombres du Minotaure, du Roi des Aulnes, du siège de Sarajevo, du nid d’aigle du Führer…
Au plateau, deux hommes hantés, des presque fantômes. Et des pantins, traces d’enfances bouleversantes et bouleversées. L’Homme et le Pantin…

ET SI NOUS ÉTIONS DÉJÀ MORTS ?
Moloch le dit : « Comme c’est bon d’être vivant, et de savoir qu’en réalité vous êtes mort. Vous savez que vous pouvez tout vous permettre et que personne, pas même vous, ne peut vous nuire. Vous êtes là, mais vous n’existez pas. Vous respirez, vous parlez, vous marchez, mais vous êtes conscient que, pour les autres comme pour vous, ce n’est qu’une illusion. »
Moloch est un poème qui aurait pu débuter comme un conte : « Le soir de Noël fut marqué par une tempête de noroît qui semblait vouloir effacer le souvenir d’une année dans l’ensemble calme et ensoleillée. A une altitude immense, on voyait passer, criant de peur, des oiseaux de mer emportés par un souffle panique… »
Moloch dit (d’autres l’ont dit déjà) que nous n’arrivons jamais à savoir qui nous sommes, que nous n’arrivons jamais à être une seule des multiples personnalités qui nous habitent, que nous ignorons lequel de nos démons internes exhalera notre dernier soupir. Personne ne connaît vraiment personne : ni le frère sa soeur, ni l’amant sa maîtresse, ni la fille son père.
Moloch est un poème dont le paysage est la guerre.
« La guerre est en tous les hommes, quelles que soient leurs opinions politiques, leur religion, leur nationalité, leur race. C’est l’abîme sous notre peau à tous, à l’intérieur de nos crânes à tous. Et lorsqu’on a regardé dans cet abîme, qu’on a contemplé ce grand vide, on ne peut plus détourner les yeux, car l’abîme nous contemple à son tour. »
Moloch nous dit : « Prenez garde à l’Ogre ! il convoite vos enfants. »
L’Ogre est issu de la nuit des temps, il était déjà là il y a mille ans, il y a cent mille ans. « Prenez garde à l’Ogre ! »
Dans Moloch, « la guerre est une messe noire célébrée au grand jour, et les idoles barbouillées de sang devant lesquelles on fait agenouiller les foules mystifiées s’appellent : Patrie, Sacrifice, Héroïsme, Honneur.»
Soufflent sur Moloch les vents mauvais qui balaient l’Europe en ce début de XXIème siècle : « Nous serons heureux quand enfin nous serons seuls, à nouveau, dansant nos danses et chantant nos chansons, sans la compagnie polluante des autres ! »
Oui, peut-être sommes-nous vraiment morts…
Au coeur de Moloch, il y a le visage d’une jeune fille, Ana Mladic, qui, seule, mena la plus dure des révolutions : voir en son père, qu’elle aimait plus que tout au monde, un bourreau. Son père, l’Ogre.

Jean-François Matignon

L’IMPOSSIBLE PROCÈS

Les 26 et 27 mai, une grève se transforme en émeute dans les rues de Pointe-à-Pitre en Guadeloupe. les forces de l’ordre tirent à balles réelles sur ces ouvriers désarmés. Il y a des morts, des blessés et une population traumatisée. Dix-huit Guadeloupéens sont traduits devant les tribunaux pour un crime qu’ils n’ont pas commis, sinon celui de dénoncer la politique d’un système colonial. Ils sont défendus par dix-sept avocats et soutenus à la barre par des illustres personnalités : Jean-Paul Sartre, Aimé Césaire, Paul Vergès…

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Extraits de Presse

Presse 2020
Podcasts RFI
La Francophonie d’Outre-Mer

Article Outremers 360
Quand le théâtre se met au service de l’histoire contemporaine de la Guadeloupe à Paris
La 1ere France Info – Le portail des Outre-Mer
L’impossible procès » gagné aux Zébrures de Limoges
Les Francophonies – Des écritures à la scène
http://www.lesfrancophonies.fr/L-Impossible-proces
Madinin’Art – critiques culturelles de Martinique
https://www.madinin-art.net/histoire-et-theatre-limpossible-proces/
Toute la culture
https://toutelaculture.com/spectacles/theatre/les-zebrures-dautomne-ouvrent-la-premiere-de-limpossible-proces-qui-met-en-lumiere-les-emeutes-malconnues-de-mai-1967-en-guadeloupe/
Théâtre contemporain – le Laboratoire du Zèbre
https://www.theatre-contemporain.net/video/Le-laboratoire-du-Zebre-autour-de-L-Impossible-proces-m-e-s-Luc-Saint-Eloy?fbclid=IwAR1-T1dyg97ZQXVxV9Qrqw8Hv–fAwQsYGSPraZfwDXt0mN4GmL062mc2kY
Théâtre de l’Union – Interview de Guy Lafages
https://www.theatre-union.fr/fr/show/limpossible-proces

Presse 2018/2019

« … Avec son théâtre réel, le metteur en scène apporte ce qu’un article ou un documentaire ne pourrait exprimer : une dimensions humaine de l’émotion. Le message qui en jaillit explose avec d’autant plus de force… » Jacqueline Brunelle – FRANCE ANTILLES MARTINIQUE (juillet 2018)

« … Il faut bien continuer à coproduire de tels chefs d’oeuvres artistiques! … » Yvor J. Lapinard – FRANCE ANTILLES GUADELOUPE (décembre 2018)

« … On doit se féliciter de la réussite d’une entreprise ambitieuse qui a fait le pari d’une adhésion du public à une forme de théâtre pédagogique, au service de l’histoire… » Scarlet Jesus (février 2019)

« … Cette reconstitution est d’un grand intérêt historique. Elle rassemble la population autour d’une période importante d’une histoire que les archives officielles existantes n’ont jamais permis délucider… » Alvina Ruprecht – THÉÂTRE DU BLOG (février 2019)

« … Les festivaliers de Cap Excellence en théâtre ont salué la prestation des comédiens par une standing ovation, le 18 mai au complexe Félix Proto. Un plébiscite partagé par les vrais protagonistes, Serge Glaude, Ken Kelly – présents dans le public… Pierre Santini a endossé le rôle sur-mesure du Présidentdu tribunal… » Cécilia Larney – FA LE MAG (mai 2019)

ITALBANAIS

Italien ou albanais ? Aucun des deux ou les deux à la fois ?

S’inspirant d’un moment d’histoire méconnu, ce monodrame aborde le thème de l’identité avec humour et tendresse.

À la fin de la seconde guerre mondiale, des milliers de soldats et de civils italiens se retrouvent prisonniers en Albanie. Nombre d’entre eux – des hommes, pour la plupart – sont condamnés pour activité subversive mais sont rapatriés en Italie. Leurs femmes et leurs enfants, en revanche, sont retenus en Albanie et internés dans des camps de prisonniers où ils resteront plus de quarante ans, oubliés de tous. Le protagoniste est un de ces oubliés. Né dans le camp, il voue un culte à son père et sa patrie qu’il n’a connu ni l’un ni l’autre. À la chute du régime, en 1991, il part à la recherche de ce père mythifié avec le temps et découvre une Italie différente de celle qu’il s’était imaginée. Mais, si en Albanie lui et ses pairs était considérés comme des Italiens, en Italie ils sont perçus comme des Albanais…

Plus qu’un monologue psychologique, c’est un récit. Le récit d’une vie.
Le récit de toutes ces vies ballottées d’un pays à l’autre , d’un monde à l’autre, d’une culture à l’autre.

L’errant.
L’errant n’explique pas, il raconte.
Il ne se plaint pas, il éprouve.
Il ne demande pas d’aide, il partage.

– « Papa, on va où ? »
– « Eh, on va dans l’endroit le plus beau du monde. »
– « Et c’est quoi l’endroit le plus beau du monde ? »
– « L’Italie »
– « Et c’est comment l’Italie ? »
– « Eh, c’est un endroit très beau, l’Italie. »
– « Et pourquoi c’est un endroit très beau ? »
– « Mais parce qu’en Italie il y a les plus belles villes du monde : Florence, Rome, Venise.
– « Il n’y a rien de plus beau qu’être italien. »
– « Et pourquoi il n’y a rien de plus beau qu’être italien ? »
– « Mais parce qu’en Italie on est tous peintres, musiciens, chanteurs…. »

C’est du théâtre épique en miniature. Y apparaissent des prisonniers, des gardiens, des soldats, compagnons et adversaires, la terre, la mer, le ciel, des avions.

 

UN BON PETIT SOLDAT

Un Bon Petit Soldat nous fait entrer dans la tête de Karim, un jeune français d’origine maghrébine qui nous emmène avec lui un 24 décembre dans le métro parisien, où il doit faire un attentat suicide.
Karim se pose des questions. Et la pièce nous pousse à nous poser des questions aussi.

Le théâtre politique n’est pas forcément un théâtre à messages.

Un théâtre qui cherche la vérité risque de soulever plus de questions qu’il ne propose de solutions. Ce n’est pas une faiblesse, c’est une force. Il doit ouvrir les yeux des spectateurs et stimuler leur pensée.

Il doit aussi tenir compte de l’émotion humaine, sans que la pensée s’y noie, et faire en sorte que l’empathie puisse contribuer à la réflexion. Le théâtre nous aide à nous mettre à la place de l’autre. Il nous permet de vivre un drame à la fois de l’intérieur, en nous identifiant aux personnages, et de l’extérieur, en spectateur avec un regard critique.

C’est justement là sa vraie grandeur. C’est là qu’il joue un rôle essentiel dans la démocratie. Au moment où la classe politique semble oublier ce rôle, et où notre société toute entière semble vouloir ranger le spectacle vivant dans l’industrie du divertissement, il serait bien de s’en souvenir.

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MEDIAPART
« L’auteur fait dialoguer son personnage avec le public. Il lui confie ses doutes, mais aussi laisse voir son côté obscur. Par les questions qu’il pose dans sa pièce, il fait réfléchir sur un sujet sensible qui a vu plusieurs dénouements tragiques se répercuter à travers le monde. Cette lecture surprend, par son ambivalence entre le subjectif et l’objectif, de l’action réelle jusqu’à la fiction. C’est en cela que nous vous invitons à lire Un bon petit soldat (chez Lansman Editeur). À notre avis ce texte accompli devrait faire référence, sur le thème des attentats. »
Dashiell Donello

« Un Bon Petit Soldat » est né d’un projet plus grand, un ensemble de plusieurs pièces sur des attentats dans des capitales européennes. Ce projet a d’abord été conçu le lendemain de l’attentat dans le métro de Londres en juillet 2005. A l’époque je voulais parler d’un attentat dans le métro parisien, un peu pour dire « ça pourrait arriver ici ». La pièce est devenue de plus en plus ambitieuse et de plus en plus irréalisable. En 2015 j’ai été rattrapé par la réalité – c’est arrivé ici. J’ai pourtant continué à y penser et à suivre de nouvelles pistes. Finalement, sans renoncer complètement au projet d’ensemble, j’ai décidé de prendre un élément de ces multiples histoires et d’en faire une pièce simple, que je pourrais monter moi-même assez vite.

Un des éléments principaux de ce projet sans cesse reporté était l’histoire de deux frères, deux jeunes arabes avec des difficultés pour s’intégrer dans la société française. L’aîné se radicalise en prison et entraîne son jeune frère, qui lui est un peu plus intégré et un peu moins convaincu par le jihadisme, dans un projet d’attentat. L’aîné se fait exploser, mais le cadet rencontre une fille la veille et finalement bascule du côté de la vie. J’avais tout cela en tête bien avant que les frères Kouachi et Abdeslam ne viennent apporter leur grain de sel.

J’ai choisi de raconter l’histoire du petit frère, pas du grand, sans doute parce que je me sens plus proche d’un personnage en proie au doute, et que sur le plan dramatique je trouve cela plus intéressant. Karim descend dans le métro parisien un 24 décembre avec l’intention de se faire exploser en même temps que son frère et quelques autres dans d’autres capitales européennes. Il nous confie ses pensées, tout ce qui lui passe par la tête, sautant parfois du coq à l’âne et révélant malgré lui à la fois son inconscience et ses motivations profondes.

J’ai choisi une forme qui m’est familière depuis mes « Chroniques d’une Année de Crise », le monologue confidentiel, où un personnage confie tout ce qui lui passe par la tête au public, se révélant ainsi beaucoup plus qu’il n’en a lui-même conscience. Cela me permet de raconter une histoire avec humour et concision en utilisant le non-dit et les ellipses. Ce qui émerge, c’est le portrait d’un garçon sensible, attachant, sans cesse sur le fil entre l’intégration et le rejet de la société qu’on lui propose et qui ne l’accepte jamais complètement.

En filigrane apparaît le thème de l’empathie. Alors que son frère s’enferme dans une logique de mort, Karim reste ouvert à la vie et se révèle incapable de tuer parce qu’il se met à la place des autres.

J’aimerais que ma pièce aide les gens à se mettre à la place de garçons comme mon personnage. C’est le propre du théâtre : on vit l’histoire à la fois de l’intérieur, en s’intéressant aux personnages, et de l’extérieur, en les regardant et en les jugeant. Ce n’est pas parce qu’on comprend quelqu’un qu’on approuve tout ce qu’il fait, même si on le trouve sympathique…

Et j’aimerais bien que le théâtre reprenne sa place au centre de la démocratie.

Mitch Hooper

LA MALADIE DE LA FAMILLE M

La famille M., composée de Luigi le père, Marta et Maria les deux filles et Gianni le fils cadet, vit à la périphérie d’une petite ville, au bord d’une route nationale. Luigi a perdu sa femme et sa mémoire s’altère. Gianni ne sait pas quoi faire de ses dix doigts et Maria, elle, se demande si son Fulvio l’aime vraiment ou s’il ne lui préfère pas son meilleur copain Fabrizio. De quiproquos amoureux en mésaventures tragi-comiques, ce petit monde en pleine perte de repères et de valeurs évolue sous le regard d’un médecin qui veille à la santé physique et psychique de chacun. Très attaché à la famille M. depuis la mort de madame M., il dresse un tableau général, plein de tendresse, de désabusement et d’humour de ce qu’il nomme la « maladie de la famille M. ».

J’ai une histoire particulière avec la famille M. C’est un des premiers textes que j’ai connus en commençant le théâtre. Je me suis tout de suite senti proche des personnages, comme si j’étais l’un des leurs. Leur bataille contre le deuil, cette violence à vivre après le drame, les pièges d’une famille, ce blocage quand on veut dire ce que l’on ressent, quand on veut parler aux gens qu’on aime, cette difficulté quand on cherche une vraie raison de vivre: j’ai connu ça, je l’ai vécu. J’ai tout de suite su que je voudrais un jour faire quelque chose avec ce texte.

J’ai pris de l’âge sans être vieux. Me voilà prêt à parler de nous à travers les mots de Paravidino, à parler de notre jeunesse, une jeunesse riche de ses différences, qui a la rage de faire de belles choses, et l’insolence de vouloir faire un théâtre nouveau. Une jeunesse prête à créer son théâtre, pour nous, pour tous, le théâtre de demain… Nous sommes dans une tragi-comédie où l’humour permet d’exprimer ce qu’on a dans le cœur.

PROUST À VOIX HAUTE

PROUST À VOIX HAUTE par LECTIO ORCHESTRAM

LECTIO ORCHESTRAM inaugure son cycle de lectures avec PROUST  À VOIX HAUTE, un voyage en six étapes, à travers À la recherche du temps perdu et Le Temps retrouvé, tous les derniers lundis du mois, de janvier à juin 2020, au Théâtre de l’Épée de Bois. Première étape : Combray.

LECTIO ORCHESTRAM est un chœur d’une vingtaine d’acteurs, réunis par Laurence Février, qui propose au public la lecture-orchestre d’une œuvre littéraire. Il s’agit de faire entendre la multiplicité des sens et des émotions de l’œuvre par la multiplicité des voix. Les lecteurs et les lectrices du chœur ne personnifient pas les personnages ou l’auteur du texte, mais chacun et chacune donne à entendre, de façon chorale, une approche personnelle et sensible du passage qui est lu.

L’univers de l’œuvre n’est donc pas révélé par une lecture objective et neutre qui se voudrait universelle, mais par une lecture multipliée, grâce à l’approche singulière de tous les lecteurs, qui créent un lien intime et émotionnel avec l’univers de l’auteur.

« Par l’art seulement nous pouvons sortir de nous, savoir ce que voit un autre de cet univers qui n’est pas le même que le nôtre, et dont les paysages nous seraient restés aussi inconnus que ceux qu’il peut y avoir dans la lune. Grâce à l’art, au lieu de voir un seul monde, le nôtre, nous le voyons se multiplier, et autant qu’il y ait d’artistes originaux, autant nous avons de mondes à notre disposition, plus différents les uns des autres que ceux qui roulent dans l’infini…» (Le Temps retrouvé).

L’œuvre de Marcel Proust est une réflexion majeure sur les fonctions de l’art, sur la mémoire affective et sur notre rapport au temps. Proust s’interroge sur l’existence même du temps – qu’il écrit avec un T majuscule – sur sa relativité et sur notre incapacité à le saisir au présent. Il crée aussi une nouvelle Comédie humaine où il analyse la société aristocratique et bourgeoise de son époque.

À partir de 1907, Proust ne vit plus que pour l’accomplissement de son œuvre. Il a l’intuition qu’elle aura un retentissement planétaire. Il a conscience que sa pensée le dépasse, il s’efface devant ce qu’il observe de lui-même et des autres, le narrateur « n’étant qu’une figure creuse », qui permet la richesse d’une description au scalpel de l’existence des quelques 200 personnages de la Recherche. Le jour de sa mort, il ne s’arrête de travailler qu’à 3 heures du matin, conscient qu’il est proche de sa fin, regrettant éperdument de ne plus avoir l’énergie d’écrire ce qu’il ressent au fur et à mesure de son agonie… Il meurt deux heures plus tard.
« Quand d’un passé ancien, rien ne subsiste, après la mort des êtres, après la destruction des choses, seules, plus frêles, mais plus vivaces, plus immatérielles, plus persistantes, plus fidèles, l’odeur et la saveur restent encore longtemps, comme des âmes, à se rappeler, à attendre, à espérer, sur la ruine de tout le reste, à porter sans fléchir, sur leur gouttelette presque impalpable, l’édifice immense du souvenir. » (Du côté de chez Swann).

Première étape le 27 janvier : Combray
Deuxième étape le 24 février : Un amour de Swann et Nom de pays : le nom

PARADOXE SUR LE COMÉDIEN

Très lié dans sa jeunesse au monde du théâtre, Diderot, dans un dialogue où se mêlent la passion, l’humour et la réflexion de l’encyclopédiste, pose une question essentielle et toujours irrésolue : qu’est-ce que l’acteur ? Nous avons voulu tout d’abord mettre à l’épreuve les principes du philosophe, les confronter à notre pratique quotidienne de la scène, pour finalement n’en conserver qu’une réflexion généreuse et passionnante sur notre métier.

Nous ne prétendons ni respecter à la lettre une tradition du XVIIIe siècle, ni moderniser une théorie que Diderot lui-même ne voulait pas dogmatique. Nous nous proposons de partager avec le public cette lecture qui peut encore, avec ses limites, interroger, stimuler, faire vivre des comédiens.

HUIS CLOS

«  Il faut choisir : se reposer ou être libre. » (Thucydide)

Sartre situe l’action de Huis Clos en Enfer. Un garçon d’étage introduit sur la scène trois morts qui sont trois salauds : un journaliste-publiciste nommé Garcin, Don Juan cynique, une ancienne employée des Postes, Inès, homosexuelle, et une jeune mondaine, Estelle. Questionnant leur présence dans ce lieu, ces trois morts vont devoir s’interroger sur leur damnation et sur leurs actes dissimulés sous les masques du mensonge et de la lâcheté. Le supplice de ce trio où toute alliance s’avère vite impossible, est que chacun devient inéluctablement le bourreau de l’autre. Et cela éternellement.