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ANTIGONE 82

Il y a l’histoire :
Beyrouth 1982. Aller mettre en scène l’Antigone d’Anouilh en pleine guerre du Liban en distribuant les rôles à des acteurs issus de chaque camp ennemi (chrétien, chiite, palestinien sunnite, druze) pour une représentation unique dans un cinéma délabré sur la ligne de front, et offrir ainsi deux heures à la paix entre cour et jardin, c’était inconcevable, irréalisable, une folie !

« Alors, faisons-le ! » c’est la réponse en forme de défi que Samuel Akounis, jeune metteur en scène grec échappé en 1974 de la dictature des Colonels et réfugié à Paris, va mettre passionnément en œuvre et que la maladie interrompt brusquement.

C’est à son ami et metteur en scène Georges, qu’il confie alors cette mission à la fois dérisoire face au chaos de la guerre et riche de l’humanité terrible et bouleversante qu’elle va mettre en jeu et qui fait terriblement écho à notre époque.

…et il y a le style :
Les rythmes, l’alternance entre le récit à une ou plusieurs voix et les scènes dialoguées, le titre même du roman ce « quatrième mur » invisible au théâtre entre la scène et le public, tout est une invitation à le faire tomber et créer ainsi une proximité plus grande avec le plateau, un présent de la représentation plus saisissant. D’où un dispositif public en tri-frontal qui permet aux acteurs d’intervenir aussi bien depuis le public que sur scène et de donner ainsi voix, corps, musique et sons à la puissance poétique et philosophique du texte.

L’AFFAIRE JEAN ZAY

Jean Zay, Ministre de l’Éducation Nationale et des Beaux-Arts de juin 1936 à Septembre 1939, s’engage dès le début du conflit mondial. Arrêté le 16 août 1940, il est condamné, après un simulacre de procès, à la déportation et à la dégradation militaire pour « désertion en présence de l’ennemi ». Jean Zay, symbole du front populaire, sera victime d’un procès politique qui le condamne à une peine qui n’avait plus été prononcée depuis Dreyfus. Dans ce règlement de compte politique, Vichy se venge sur ceux qu’il tient pour responsables de la défaite.

Durant sa détention, Jean Zay entretient une correspondance quasi quotidienne avec sa femme Madeleine. Il écrit « Souvenirs et solitude », une méditation sur sa condition de prisonnier et « L’Affaire Jean Zay » où il démonte point par point les arguments de ses accusateurs.

L’ensemble de ses écrits représente d’abord un témoignage bouleversant. Il se dessine, page après page, toute la détresse et la force d’un homme pris dans les rouages d’une dictature à laquelle Jean Zay oppose une force d’âme sans pareil. « L’Affaire Jean Zay » témoigne de l’intégrité d’un homme, dont la foi dans le droit, la justice et la liberté intellectuelle constituent un acte de résistance à la dictature vichyste.

Nous voulons faire entendre ce récit parce que nous croyons en sa force de témoignage et à la dimension émotionnelle que peut prendre cette écriture dans l’espace théâtral. Cette pensée d’un homme dans sa solitude, redevenue parole vivante, pourrait bien nous aider à structurer notre pensée contemporaine.

LA LETTRE À HELGA

Mieux qu’un vol sec, une immersion en terre d’Islande

Au crépuscule de sa vie, le vieux Bjarni Gíslason répond enfin à la lettre d’Helga, adressée il y a si longtemps et l’invitant à la rejoindre à Reykjavík. Partager enfin cet amour fou né dans la bergerie, un jour de palpation des moutons pour savoir lesquels passeraient l’hiver, loin des ragots sur cet amour extra-conjugal. Mais le vieux refrain où il est dit « L’amour le plus ardent est l’amour impossible » aurait-il raison ?

« Quitter la campagne où mes ancêtres avaient vécu depuis un millénaire, pour travailler dans une ville où l’on ne voit jamais l’aboutissement du travail de ses mains ? Où même les canards des étangs sont tristes ? »

Dans cette réponse tardive, Bjarni feule son amour pour sa belle et sa lande et cette question : comment rejoindre l’une sans trahir l’autre ?

Bergsveinn Birgisson nous plonge au cœur de la paysannerie islandaise tout au long du XXe siècle. Une saga contemporaine faite d’hommes et de bêtes, d’amendement de cette terre âpre, d’économie où rien ne se perd, d’esprit coopératif, de culture forgée au fil des siècles et des travaux dont l’abandon signerait sa perte irrémédiable.

Le formidable cri d’amour d’un vieil éleveur de moutons.

LE JOUEUR D’ÉCHECS

Zweig élabore un récit en abîme où les interférences entre jeu d’échecs, jeu d’écriture et jeu de manipulation du lecteur donnent à l’œuvre puissance et suspense. Mais ce suspense revêt un caractère exceptionnellement grave quand on resitue Le Joueur d’Échecs dans l’Histoire.

LE CABARET DES TROIS SŒURS

À l’instar des trois sœurs de Tchekov, qui vivaient isolées dans une province Russe, ces trois sœurs vivent à Moscou et rêvent de partir… de partir où ? Ailleurs !
À travers des monologues étonnants, elles nous parlent de leurs rêves, leurs espoirs, leurs échecs, dans la Russie d’ aujourd’hui.

« Leurs chansons russes, françaises, anglaises, allemandes, nous font voyager dans le temps, et dans l’espace. De la Russie traditionnelle aux cabarets des années 20, soviétique, berlinois, ou parisien, du chant lyrique au rock’n roll baroque, jusqu’au Moscou actuel, où elles sèment les graines d’une joyeuse révolte. »

La presse en parle
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REQUIEM DES INNOCENTS

Requiem des Innocents est un texte qui réunit neuf créatures clowns échouées dans un lieu où ils cherchent à comprendre le pourquoi et le comment de leur mort. Ils étaient innocents, ils ne savaient pas qu’ils pouvaient porter une marque ancestrale qui ferait d’eux des victimes de la violence.

LA CERISAIE, VARIATIONS CHANTÉES

La Cerisaie : les amours impossibles, le départ définitif, l’emprise de l’argent, l’espoir d’une nouvelle vie, la destruction du passé, fût-il un bois, un jardin de cerisiers, une maison, une vie… Des thèmes d’aujourd’hui qui réunissent toutes les générations : les jeunes qui rêvent d’un beau futur, les adultes qui luttent contre ou se plient parfois à la férocité des temps, les vieux que l’on oublie… De cette exploration du texte et des thèmes de cette grande pièce nous avons essayé de faire un spectacle qui coule fluide, comme un fleuve, comme un film : pas de décor sauf une énorme toile blanche, quelques accessoires. Et la musique, des chansons du répertoire et des chansons originelles. Un chœur d’artistes comédiens chanteurs jouent la Cerisaie et racontent la genèse de sa création à travers les lettres de Tchekov à sa femme Olga et à son metteurs en scène, le célèbre Stanislavsky.

 

 

 

LA CANTATE À TROIS VOIX

Trois femmes, la nuit du solstice d’été, l’une fiancée l’autre séparée de son époux la troisième veuve, invoquent, convoquent l’être absent, l’être aimé : un hymne à la Femme et au Désir ! La grâce absolue de la poésie de Claudel alliée à une partition musicale originale, sensible et inspirée.

DISCOURS SUR LE COLONIALISME

« La colonisation est la tête de pont de la barbarie d’où, à n’importe quel moment, peut déboucher la négation pure et simple de la civilisation… Le colonisateur qui, pour se donner bonne conscience, s’habitue à voir dans l’autre la bête, s’entraîne à le traiter en
bête tend objectivement à se transformer lui-même en bête. »
(Discours sur le Colonialisme)

« A tout réajustement politique, à tout rééquilibrage d’une société, à tout renouvellement des moeurs, il y a toujours un préalable, qui est le préalable culturel. »
(Discours sur la Négritude)

Aujourd’hui le « Discours sur le colonialisme », mémoire de l’Histoire vu du côté de ceux qui ont subi et souffert de la colonisation peut aussi être entendu comme un cri libérateur et vivifiant pour tous, véritable affirmation de la dignité de l’être humain d’où qu’il vienne dans son « être au monde » réévaluant le passé, pour construire le futur ensemble.

Dans une forme de spectacle épuré les deux comédiens donnent à entendre pour l’un la parole d’Aimé Césaire et pour l’autre les différents points de vue des figures convoquées par l’auteur dans ce texte. La musique originale se révèle au fur et à mesure en résonnance, réminiscence ou contrepoint pour accompagner la pensée d’Aimé Césaire.

L’ANNÉE TERRIBLE – 1870-1871 – Extraits

L’Année terrible est un recueil de poèmes publié en 1872, dans lequel Victor Hugo évoque les événements qui ont marqué la France, et particulièrement Paris, lors des années 1870-1871. Il représente donc la guerre de 1870 avec la Prusse, la défaite de la France et le siège de Paris, la chute de l’Empire et l’avènement de la IIIe République, ainsi que l’insurrection populaire de la Commune qui sera réprimée par l’armée gouvernementale dans le sang. Exilé depuis vingt ans, il rentre à Paris dès le 5 septembre 1870, pendant la guerre, toujours engagé dans le combat contre l’injustice et prêt à en découdre avec toutes les tyrannies.

En savoir plus – « La Gazette »

À propos de Ma patrie et ma gloire et mon unique amour. Victor Hugo
Lorsque nous, qui sommes venus d’ailleurs, parlons des bienfaits de notre pays, la France, il arrive que notre interlocuteur ébauche un sourire de gêne et de désapprobation. Si c’est une manifestation de pudeur, ce sourire ne fait qu’ajouter à notre joie. Mais parfois, le sourire qui suit notre compliment envers notre nouveau pays est synonyme d’agacement et donne la sensation que notre interlocuteur, souvent d’une sensibilité « de gauche », ne voudrait entendre aucune opinion positive sur la France, car cela impliquerait, croit-il, de se ranger du côté de la « droite » qui, de son côté, ne peut accepter aucune critique sur la sacro-sainte France.
Nous qui nous sommes heureux de travailler et de vivre dans notre nouveau pays, nous plaidons en faveur de notre amour pour la France, qui, comme tout amour véritable, admet aussi bien les compliments que la critique, voire la désapprobation. Ces contrastes sont le reflet des climats divers dont est constituée la « douce France » .

A. D.-F.